Chacun sa merde...



Surtout à notre époque où tout est hors-sol… Nous nous sommes élevés comme des ballons dans le ciel dont la main a lâché la ficelle. Les hommes se sont envolés et flottent au gré des courants, mais ne sont plus rattachés à leur environnement la terre par de profondes racines. La réalité, notre réalité ne nous effleure plus. Nous en sommes absents, par manque de temps et par indifférence, tout occupés que nous sommes à faire face à la nécessité de se remplir de choses inutiles. Nos vies tournent au confort nécessaire, un confort apparemment vital, fait de petits coussins pour le cerveau, et qui... endorment. Knock out ! Bonne nuit les petits.

Nous ne renoncerions pas à l’un de nos coussins. C’est tellement agréable… Et d’ailleurs ce n’est pas tout à fait le problème. C’est plutôt que ce confort bourgeois nous fait oublier tout le reste : et notre terre sur laquelle nous vivons, et les humains avec lesquels nous cohabitons, qui eux, pour beaucoup, et à l’intérieur même des nations mêmes, sont en détresse.

Chacun sa merde…

Ceux qui pensent comme ça se trompent. Et ce n’est pas qu’une question de moralité dogmatique ou utopique bref de gauche. C’est simplement une question de cause et d’effets. « quand je pense à toi je pense à moi » écrivait JJ Golman. Je ne suis pas vraiment fan mais il a raison et je respecte l’artiste et son écriture. La bible dit à juste titre que « l’on récolte ce que l’on sème ». Le déni n’a jamais fait disparaître un problème. Or nous sommes dans le déni de beaucoup trop de choses : la corruption, la misère sociale, la misère intellectuelle, la pollution environnementale, la pollution télévisuelle… Nous sommes beaucoup trop indifférents à tout ce qui se passe autour de nous.

Tirer son épingle du jeu, c’est bien. Et nous sommes nombreux à en être là aujourd’hui. Je conçois très bien cette position qui est souvent la seule possible. Mais malheureusement ça ne suffit plus.

Personnellement, je réfléchis toujours à des stratégies pour apporter mon soutien et mon travail à la collectivité sous forme de bénévolat (une bonne dizaine d’année impliqué dans des associations auprès des anciens, auprès des jeunes, auprès des littéraires), et aussi de manière beaucoup moins visible auprès de mes amis et proches.

Rester connecté à l’essentiel tout en liant ce cap à notre réalité est un pur défi. Ne pas perdre pied, oui cela est dur tant les influences, les contraintes s’emboîtent les unes dans les autres...René Char écrivait “Ne faites pas le fier. Respirer, c'est déjà être consentant. D'autres concessions suivront, toutes emmanchées l'une dans l'autre.” .

Pour ceux qui pensent que je fais le malin que je fanfaronne : je suis juste dans le combat contre moi-même, contre toute influence qui nous « déréalise ». J’ai payé ma dette à la prétention et à la certitude. Il est sain de douter. Mais comme l’écrivait Tzara – quand j’écris j’ai des tas de citations qui me reviennent en tête - « le provisoire ne saurait obérer les déterminations durables » .Autrement dit, on « s’égare » pour mieux pouvoir se retrouver. Ce qui vaut pour la poésie, vaut pour soi, pour tout combat.

Suite à cette citation que j’ai du aller rechercher à la source du livre grains et issues de chez flammarion, j’ai été court-circuité. Me voilà avec l’envie de relire du Tristan Tzara… J’adore !